C'est avec beaucoup d'émotion et une profonde tristesse que la Fédération Française de Hockey a appris le décès de Philippe Reynaud à l'âge de 96 ans. Philippe était l'un des rares hockeyeurs français a avoir participé à trois Jeux Olympiques : en 1948, en 1952 et enfin en 1960.
La Fédération Française de Hockey soutient sa famille et lui présente ses sincères condoléances. Les obsèques de Philippe Reynaud auront lieu le mardi 27 novembre à 14h15 à l'église de Notre-Dame à Pontoise.
En cette occasion, la FFH souhaite vous offrir la possibilité de lire ou relire l'article publié en 2017, intitulé "Dans la tête de Philippe Reynaud", article qui nous plonge dans la vie de ce grand hockeyeur français.
Présentez-vous-en quelques mots
1m76, 75kg (il y a 60 ans) né à Villebon sur Yvette. J’étais à Pontoise en 1934, puis la guerre est arrivée. J’ai reçu plusieurs distinctions au sortir de cette deuxième guerre mondiale : Médaille du combattant, Croix de Guerre 39-45, Engagé volontaire pour la durée de la guerre et Maquis de l’Ardèche (Résistant Francs-Tireurs Patriotes). La paix revenue, je suis devenu professeur à Saint Martin de Pontoise.
Philippe Reynaud pendant la Seconde Guerre Mondiale
Côté hockey, voici mon palmarès : 81 sélections, 3 Jeux Olympiques, 3ème place aux Jeux Méditerranéens de Barcelone. Capitaine une quarantaine de fois. Demi-centre surtout. J'ai aussi reçu la Médaille du Mérite Sportif par Maurice Herzog.
Philippe Reynaud pendant les Jeux Méditérannéens à Barcelone avec l'Equipe de France
Comment avez-vous débuté le hockey ?
J’ai commencé à l’école d’Ile de France de Villebon-sur-Yvette (Seine et Oise) en 1930, à l’âge de 8 ans, éduqué et conseillé par M.Fairglaugh. Dans cette école, le hockey était pratiqué tous les jours pendant une heure, surveillé et arbitré.
Philippe Reynaud tout à droite, juste à sa gauche Diran Manoukian.
Après la fin des études, en général les anciens élèves jouaient au Golfer’s Club, au Racing ou au Stade Français. Personnellement, c’est au Stade que j’ai joué en « réserve », accompagné de mes frères, à 14 ans (1936-1940), voilà pour mes débuts en scolaire et en club.
A cette époque les jeunes jouaient soit en scolaire soit en club. Le championnat était ouvert aux deux.
Combien d’années avez-vous joué au hockey ?
J’ai joué et entraîné à peu près de 1928 à 1985, donc durant 57 ans.
Philippe Reynaud, entraîneur de hockey à Pontoise en 1955-1956.
De 1928 à 1975, à l’Ecole d’Ile de France, Ecole Saint Martin de Pontoise et au Stade jusqu’en 1940 puis au LOU (Lyon Université Club) (1940-1941) avec Tola Vologe, Stade Français (1942-1943) avec Diran Manoukian et les frères Hauet, Saint Ouen l’Aumône (1946-1957), Saint Germain (1957-1958) et Stade Français-Faisanderie (1958-1980).
Saint Martin Equipe 1ère saison 1937-1938.
De gauche à droite debout : Ph.Reynaud, X, Bouchy, Carle, du Péage, Michel Imbert
à genoux : Lemaire, Coup, Renard, Simon Reynaud, Dolley
Equipe du LOU, Lyon Université Club, saison 1940-1941
De gauche à droite debout : Arlin Pichot, Beauvilain, S.Reynaud, Ph.Reynaud, Morandi, Sargnon, Pintrant, X
Devant : Cordet, Tola Vologe, Marouzeaux, Cordet, Paillier, GiovoHauet
Saison 1942-1943 au Stade Français
De gauche à droite debout : Lucas, Van Vlamertynghe, Manoukian, Maraug, Ph.Reynaud, Triquet, Andrivet
De gauche à droite en bas : Jean Hauet, Dubessay, Duquesnoy, Blanchet, Claude Hauet
Dans l’Equipe de France j’ai joué mon premier international contre l’Angleterre à Folkestone, le 5 avril 1947, j’avais 25 ans. Mon dernier match international se termine par un match nul contre la Pologne (0-0), le 1er juillet 1962 au tournoi de Macerata, j’avais 40 ans passés.
Dans un autre domaine, j’ai dirigé pendant 37 ans le hockey à l’école Saint Martin à Pontoise, jusqu’en 1985 et à la retraite j’ai entraîné le mercredi, les jeunes de Saint Germain pendant quelques années. Et puis de 1963 à 1965, j’ai été entraineur du Bataillon de Jonville.
Quelle est la meilleure place que vous ayez atteint en Championnat ?
Il y avait un Championnat de Paris avec 3 divisions, et une coupe de France. J’ai joué une demi-finale contre le Lyon HC et puis, nous avons été champion de Paris avec Saint Ouen l’Aumône en division « honneur » en 1947 et en « excellence » en 1952.
Quels résultats avez-vous fait avec l’Equipe de France lors des Jeux Olympiques de 1948, 1952 et 1960 ?
Londres – 1948
31 juillet : France – Danemark 2-2
3 Août : France – Hollande 0-2
5 Août : France – Pakistan 1-3
7 Août : France – Belgique 0-1
Gagnant : Pakistan
Jeux Olympiques d'Helsinki juillet 1952
Meyer, Bégard, Capelle et Ph. Reynaud
Helsinki – 1952
16 juillet : France – Italie 5-0
18 juillet : France – Pakistan 0-6
21 juillet : France – Suisse 1-2
Gagnant : Pakistan
Rome – 1960
29 Août : France – Italie 2-0
31 Août : France – Allemagne 0-5
3 septembre : France – Kenya 0-0
6 septembre : France – Belgique 1-0
8 septembre : France – Hollande 0-2
Gagnant : Pakistan
Le 25 septembre 1960, en match amical après les Jeux, France – Pakistan 1-1 à Lyon
Quels sont vos meilleurs souvenirs des Jeux Olympiques ?
A Londres, les Jeux étaient encore influencés par la guerre et incomplets puisque l’Allemagne était exclue, mais c’était la reprise des évènements sportifs. Les grands champions étaient : Ignace Heinrich au décathlon et 110 haies, et Alex Jany à la natation.
A Helsinki, je me souviens de la sportivité des Finlandais et de leur enthousiasme. Le grand champion était Emile Zatopek, vainqueur du 5 000, 10 000 et du marathon, à Londres et à Helsinki.
A Rome, le premier match des Jeux dans le Stade bordé de statues, réservé au hockey, avec comme premier match France Italie. Il fallait gagner à tout prix ! Je me souviens que pendant ces Jeux Olympiques, le stade n’était plein que lorsque les Italiens pouvaient l’emporter.
Comment était l’ambiance aux JO ?
A Londres, l’ambiance toujours exceptionnelle malgré l’époque précédente.
A Helsinki, une organisation et une sportivité hors classe finlandaise.
A Rome, la cité antique dans un monde moderne, c’était magnifique.
Dans l’Equipe, l’ambiance a toujours été très cordiale. Le village olympique permettait aux uns et aux autres de se retrouver dans une ambiance décontractée avant les épreuves du lendemain.
France - Hollande (1-1) à La Croix de Berny à Paris, le 19 avril 1947.
Philippe Reynaud au centre de l'image
Et le hockey féminin à cette époque ?
J’avoue ne pas connaitre réellement ce problème. Tout ce que je sais c’est qu’à Paris il existait, une Equipe Féminine au Stade Français, au Racing et à Saint Germain. Elles étaient développées grâce à la famille Goy et la présence de Françoise Goy, épouse de Diran Manoukian, décédée peu après son mariage, ce qui avait peiné beaucoup de monde. En province, je ne peux que vous donner mon cas personnel puisque j’ai épousé Annick Gros de Cholet. C’est elle qui avait créé le « Jeune France » de Cholet pendant la guerre.
Peu d’équipe en tout cas, juste à Bordeaux, le VGAL, et à Angers le SCO.
Depuis quelques années les progrès des licences féminines semblent être un des évènements positifs du hockey, tant mieux !
Quels sont les principales différences entre les années 1950 et aujourd’hui ?
Dans la comparaison entre Londres et Helsinki, il est évident que Helsinki avait renoué plus facilement avec la tradition sportive.
Sinon, les émissions de Télé ont bouleversé les conditions de propagande pour les Jeux de Rome, et c’est de mieux en mieux filmé ou commenté. La télévision permet au foot de devenir le sport le plus spectaculaire et le plus répandu dans le monde.
En hockey, la qualité des terrains synthétiques a permi au jeu d’être plus rapide et plus spectaculaire.
Le sport féminin a beaucoup progressé.
Quelles autres compétitions ont marqué votre esprit ?
D’une manière générale, le foot n’écrasait pas les autres sports. Le sport était pratiqué par une minorité. Mais les grandes compétitions étaient : Le Tour de France avec Antonin Magne et Charles Pelissier, le Tennis, avec « les Quatres Mousquetaires », Jean Borotra, Henri Cochet, René Lacoste et Jacques Brugnon, vainqueur 6 fois de la Coupe Davis. Le cyclisme sur piste avec Lucien Michard. L’athlétisme avec Julien Ladoumègue au 1500 m, Jesse Owens au 100 m, 200m et Longueur. La natation avec Jean Taris. Le rugby, la boxe ou encore la lutte.
Côté cour :
- Gazon ou salle ? Gazon (synthétique)
- Plutôt côte du Rhône ou Bordeaux (vin) ? Rhône (Condrieu blanc), « château Grillet », Côte-Rôtie rouge ou Cornas.
- Télé couleur ou noir et blanc ? Noir et blanc pour les films d’avant-guerre (Arletty, Gabin, Chaplin, Jouvet...). En couleur pour ceux d’après-guerre. Mettre en couleur la période 1933-1945, c’est faire disparaitre le côté angoissant de cette époque pour le faire ressembler aux défilés mascarades de la Corée du Nord.
- Poste hockey préféré ? Demi centre
Que pensez-vous de la candidature de Paris pour l’organisation des Jeux Olympiques en 2024 ?
Je n’y vois pour ma part que des avantages. Tout semble avoir été prévu dans l’organisation de ces Jeux. La France en hockey devra se surpasser.