Habituée des tournois internationaux, Sylvie Petitjean a de nouveau été désignée lors de cette édition 2023 de la Coupe du Monde de Hockey. Dans un rôle d’officiel qu’elle connait bien, la Fédération Française de Hockey est allée à sa rencontre pour un long entretien. À lire.
FFH : Bonjour Sylvie, question simple, pourquoi êtes-vous là aujourd’hui ?
Sylvie Petitjean : « Je suis ici avec le groupe des officiels. Nous sommes 10, répartis sur les deux sites. Mon rôle est principalement la gestion sportive de la table technique. Notre deuxième rôle est le soutien aux 2 directeurs de tournoi. Nous sommes un peu la 3ème équipe lors des matchs avec les arbitres. »
FFH : En quoi les différents rôles des arbitres et officiels sont importants pour la bonne tenue du tournoi ?
S.P. : « Il y a une exigence forte pour les arbitres. Ils ont une condition physique à avoir tout au long de la saison. Pour les officiels, il faut être en forme physiquement et mentalement. Nous gravitons tous autour du sport. Mais c’est surtout mentalement que nous devons être en forme. Nous vivons une pression, comme tout le monde ici, pour réussir. Nous devons connaître le règlement sans faille. Je pense que tout le monde ne se rend pas compte des exigences. Nous sommes ici au service des équipes et du hockey. Nous essayons de construire des relations saines avec les chefs d’équipe, Antoine François en France par exemple et Melissa (Grey) en Australie. Il faut savoir ici que les officiels et arbitres ici sont bénévoles et ne sont pas payés. Ils sont seulement défrayés. ».
Sylvie Petitjean à Bhubaneswar (c) FFH
FFH : En Inde, avec des profils différents et des rôles différents, comment se passent la cohésion des officiels ?
S.P : « Tout le monde parle anglais. Ici à Rourkela il y a 12 nationalités différentes sur les 9 arbitres et 5 officiels. Nous venons tous avec notre culture personnelle et cela est vraiment intéressant voire enrichissant. Ce qui nous lie, c’est la passion pour le hockey : cela nous rassemble. Nous devons apprendre à travailler en symbiose malgré les différences. Imaginez la coopération avec les arbitres, l’arbitrage vidéo, l’arbitrage réservé et les officiels avec autant de nationalités différentes… c’est extraordinaire. Les valeurs de l’arbitrage nous rassemblent. »
FFH : Peux-tu nous détailler les différents rôles ?
S.P. : « En plus des arbitres, il y’a l’arbitrage vidéo isolé dans sa salle tout en haut du stade avec ses écrans et la production TV. Il y a l’arbitre réservé à la table technique qui joue le rôle de coordinateur entre la table technique et les arbitres sur le terrain. Il y a donc ce triangle arbitres - vidéo - table technique. Cette coordination est essentielle. Chacun a son rôle bien précis. La zone table technique doit être sans faille et donc nous sommes au calme pour être concentrés. Nous regardons le match, les arbitres et surtout le chronomètre. Le temps est une donnée essentielle. »
FFH : Et au sein même de la table technique ?
S.P. : « Au sein de la technique, il y a un officiel désigné sur la gestion du temps, un sur l’application TMS pour la feuille de match digitale et un sur la bonne tenue en général du match, le Technical Official. »
FFH : Quel est ton rôle au sein de cette table technique ?
S.P. : « Les rôles changent à chaque match, quand nous sommes désignés. Nous tournons sur les 3 rôles (TO, Temps, Feuille de match). Il y a toujours un TO par match, c’est cette personne qui gère le protocole et surtout la bonne tenue du match en accord avec le règlement de la FIH. Généralement par jour et par personne nous avons un rôle de TO, un rôle pour le temps et un rôle pour la feuille de match donc 3 désignations sur 4 matchs. On tourne parmi les 5 officiels du site. Par exemple France-Argentine je n’ai pas été désignée puisque je suis Française. J’apprécie aussi quand je ne suis pas désignée, même si on prépare le match qui suit. Je n’ai pas de préférence, c’est bien d’avoir plusieurs rôles. Les charges mentales ne sont pas les mêmes pour les rôles. Quand je vois les 20000 personnes et la pression du match… il faut être extrêmement concentré. Par exemple gérer la feuille de match électronique, le TMS, il faut être très rigoureux. »
Sylvie Petitjean lors du match Inde - Nouvelle-Zélande (c) FFH
FFH : La Coupe du Monde se déroule à deux endroits. Tu es à Rourkela, 20 000 places, dans un complexe sportif crée pour la performance. Qu’en penses-tu ?
S.P. : « Je suis à Rourkela pour la première partie de la compétition et je suis impressionnée. La dernière fois que j’ai été impressionné c’était à La Haye en 2014 quand un stade de football a été utilisé pour la Coupe du Monde. Mais il n’y a pas eu d’héritage. Ici, nous sommes dans un village de Coupe du Monde, comme un village olympique. Il s’agit ici d’un centre d’entrainement de performance. Il n’y avait rien du tout il y a un an, pas même l’aéroport. Je suis impressionné par les réalisations en si peu de temps et pour le hockey. Quand l’Inde joue, c’est extraordinaire. On se rend compte ici qu’il y a une vraie culture du hockey. Ils remplissent un stade à 20000 personnes tous les soirs pour toutes les équipes au milieu de nulle part. Il faut le vivre ici pour comprendre. Ce site restera pour la Haute Performance. La Pro League se jouera ici en Inde. Il devrait servir aussi l’équipe nationale féminine. Elles seront notamment en Pro League elles aussi, il y a un gros travail de fait ici. »
FFH : Ce travail à l’international peut-il te servir pour le championnat français ?
(NB : Sylvie fait partie de la CSN des championnats français fédéraux)
S.P. : « Ce qu’on essaie de faire en France, c’est de rester logique avec le contexte Français. C’est difficile de faire la même chose qu’à l’International. Mais notre leitmotiv en France est de toujours rester le plus proche de l’exigence professionnelle. Nous essayons d’apporter notre expérience de gestion de match, pas tant sur le règlement qui est adapté par pays. »